Le joli cahier de… Florence
Quand je suis dans une soirée dans laquelle je ne connais personne, je me demande bien par quel hasard je me retrouve à parler avec des femmes avec qui je me découvre rapidement des affinités… Comme je ne suis spécialiste ni des neurosciences ni de sociologie, je n’apporterai pas de réponses à cette question ici. Et puis, est-ce important de comprendre ? Ce qui compte c’est la rencontre de l’autre, la parole qui se libère et voilà qu’on raconte sa vie à une quasi inconnue. Florence et moi, cela a commencé comme ça. On a parlé de choses et d’autres et comme souvent, avec moi, la conversation a fini par tourner autour de l’écriture et des cahiers ! Florence, qui se distingue par sa qualité d’écoute et sa bienveillance, a, depuis ce jour, fidèlement suivi et encouragé l’aventure naissante des Jolis Cahiers. Je lui avais proposé de jouer le jeu de cette interview, elle n’avait dit ni non… ni oui ! Mais preuve que ce n’était pas tombé dans l’oreille d’une sourde, c’est d’abord sa fille, Camille, qui m’a contactée pour me parler de ses cahiers. Finalement, Florence s’est laissé tenter, malgré son tempérament réservé, comme elle le souligne elle-même. Nous avons eu un long échange téléphonique. Parisienne, Florence relève depuis quelques mois un nouveau challenge professionnel, au service d’une très belle marque française implantée en Normandie où elle réside donc seule une partie de la semaine. Très engagée dans son entreprise, elle se ressource par la lecture, la cuisine ou le tricot. Mais, c’est surtout au coeur de la nature, lors de longues marches, qu’elle prend la respiration indispensable à son équilibre. Femme de lettres, elle a finalement trouvé sa voie dans les chiffres : et vous allez constater que de sa fonction de Directrice financière, elle a la rigueur et l’organisation, qui influencent son usage des cahiers !
Mes cahiers, ce sont beaucoup les cahiers pros ! Malgré l’informatique, j’aime bien et j’ai besoin de prendre des notes. J’ai parfois des cahiers persos, mais ce sont plus des carnets pour le quotidien. Globalement, j’aime beaucoup la jolie papeterie. D’ailleurs, plutôt que de prendre les fournitures standards du bureau, j’aime bien m’acheter mes cahiers : cela me permet en réunion de ne pas avoir le même que tout le monde ! J’ai toujours beaucoup écrit et pris des notes quand j’étais étudiante. Quand j’ai commencé à travailler, j’ai naturellement continué à me servir de cahiers pour mes réunions, pour mieux réfléchir, pour poser les choses. Je les utilise avec quelques petites manies.
Tu m’en dis plus…
Chaque jour, pour chaque sujet nouveau, ou en réunion, j’inscris la date en haut à gauche de ma page et le thème au milieu. Comme je suis depuis toujours un peu maniaque – je devais être la seule enfant à ranger sa chambre d’elle-même – j’aime bien écrire au crayon à papier ainsi quand je fais une erreur je peux effacer proprement… J’apprécie d’avoir un cahier bien tenu, je n’aime pas quand c’est raturé. J’étais déjà comme ça à l’école ! Pour que cela soit bien structuré, j’utilise en plus des feutres de couleurs différentes pour souligner ou mettre en évidence certaines parties. Le code est toujours le même. Cela permet de me repérer plus facilement quand je relis mes notes ou quand je veux remettre la main sur une chose importante. Par exemple, en ce moment, avec ma prise de poste, cela me rend vraiment plus efficace de pouvoir retrouver très vite des informations que j’ai pu noter plusieurs jours auparavant.
Je me sers beaucoup de mon cahier lorsque j’ai besoin de réfléchir. Je commence toujours à y jeter mes premières idées ou des premiers plans même si après je passe rapidement sur un support informatique. Je dois impérativement passer par cette étape de l’écrit et du papier pour arriver à clarifier ce que j’ai en tête et formaliser quelque chose : cela m’aide à aller plus loin, à développer ma pensée et générer des idées complémentaires.
Tu as d’autres supports papiers sur ton bureau ?
J’ai un bloc avec des feuilles libres, sur lequel j’inscris parfois des choses à la volée pour y revenir plus tard. Il me sert également quand je veux partager ma réflexion avec quelqu’un : je peux lui détacher la feuille et lui laisser. J’ai aussi un autre bloc vraiment plus petit, de type post-it, qui me sert pour ma to do list. J’ai essayé de la faire dans mon cahier : je n’y arrive pas. Je trouve que c’est compliqué quand on ne fait pas toutes ces tâches dans la journée de devoir revenir en arrière dans le cahier les jours suivants. Là, je l’ai toujours à vue sur le bureau. Ces trois supports sont vraiment complémentaires pour mon organisation.
Comment gères-tu ta to do list : tu y inscris quelques éléments vraiment importants ou c’est un inventaire à la Prévert ?
C’est plutôt inventaire à la Prévert ! J’y note vraiment les choses que je ne veux pas oublier de faire, sans classification d’urgence ou d’importance, de court ou moyen terme. Par exemple, cela peut-être d’appeler untel ou de démarrer un projet important. Ce qui compte aussi pour moi c’est d’avoir ces éléments sous les yeux en permanence sur mon bureau. Bien sûr, ce que j’aime c’est barrer quand c’est fait !
As-tu un agenda papier ?
Non, plus ! J’ai résisté pendant longtemps… j’ai été l’une des dernières à en garder un. Mais je l’ai abandonné il y a quatre ou cinq ans car cela devenait compliqué pour la gestion des réunions qui étaient inscrites dans mon outlook… et que je recopiais dans mon agenda papier ! Il est arrivé un moment de ma vie professionnelle où mes rendez-vous changeaient beaucoup et souvent. Je n’arrivais pas à répercuter sur le papier qui, de fait, n’était pas à jour et donc je le regardais de moins en moins. J’ai fini par lâcher car c’était lourd à gérer. Dans cet agenda, qui était un Filofax que je rechargeais chaque année, j’avais aussi une partie carnet d’adresse. Depuis, tous mes contacts sont dans mon ordinateur et c’est une grande crainte pour moi : si je perds cela, je n’ai plus aucune trace et plus de moyens pour retrouver les coordonnées de mes interlocuteurs. Je me pose la question de recourir au bon vieux répertoire papier, comme une sauvegarde, au cas où je perdrais toute ma mémoire numérique !
Que fais-tu de tous ces cahiers pros ? Tu as vingt ans de cahiers bien rangés ???
Je les ai tous gardés pendant longtemps. Mais, récemment, j’ai fait du tri lorsque j’ai quitté mon précédent job. J’avais pris la décision de partir et de passer à autre chose, c’était donc une façon de tourner la page, cela faisait partie du processus. Mais, j’ai quand même gardé les derniers car j’aime bien savoir que si j’ai besoin de retrouver un truc dans mes notes, c’est possible. Là, quand même, j’ai pas mal jeté. Avant cela, de changement de poste en changement de poste, de déménagement pro en déménagement pro, mes cahiers suivaient… Ils commençaient à prendre un peu de place ! Comme j’aime bien les jolis cahiers, ils faisaient aussi parti de mon décor professionnel. Les jeter n’allait pas de soi, alors que finalement je n’ai jamais recherché tant d’informations que ça dedans, surtout dans les plus vieux.
Et dans ta vie perso, quelle place a le papier ?
J’ai toujours un carnet dans mon sac à main. J’aime bien avoir de quoi écrire avec moi. On y retrouve tout mon quotidien : des courses à faire, des prises de notes lors de réunion scolaires… quand les enfants étaient plus petits, mon carnet leur servait à dessiner quand nous étions à l’extérieur, dans un musée. En revanche, je n’ai pas de cahier plus personnel pour écrire mes pensées par exemple. Quand j’étais adolescente, j’ai eu un journal intime mais l’envie d’écrire m’est passée avec le temps. Récemment, j’ai réalisé un bilan de compétences : j’ai écrit pas mal de choses mais bizarrement pas sur un cahier. J’aurai peut-être dû … et je devrais peut-être m’y mettre car j’ai parfois tendance à ruminer beaucoup. Ecrire m’aiderait sans doute à extérioriser certaines choses. Bien que cela soit entre moi et moi, je dois avoir une espèce de crainte de la page blanche : et même si je connais mes pensée, l’idée de les voir matérialisées sur le papier me bloque un peu, je crois. Actuellement, j’en ressens quand même plus le besoin, je pense même que je ne vais pas tarder à m’y mettre ! C’est sans doute de circonstance, parce que je suis seule la semaine. Quand je suis à la maison, j’ai la chance de pouvoir parler beaucoup avec mon mari, mes enfants. Ainsi, lorsque des choses me contrarient par exemple, je peux les exprimer.
A ce moment, je sens un désir d’écriture bien enfoui mais bien réel chez Florence ! Je le comprends encore mieux quand elle me relate que plus jeune, dès l’école, elle écrivait des poèmes, des petites nouvelles. Ses années lycée et étudiantes l’ont orientée vers d’autres sujets et lui ont moins laissé le temps. Mais la flamme semble toujours là !
Elle poursuit.
Ecrire m’aide sans conteste à mémoriser, à mieux penser. Cela m’accompagne dans mon organisation, ma capacité à trouver un fil conducteur, à développer des idées, à mener ma réflexion. En plus, écrire, même en situation de prise de note lors de réunions, me donne l’occasion de me recentrer. Mais j’apprécie aussi tout simplement le contact du papier, celui du crayon qui glisse dessus. Nous sommes dans des univers tellement numériques et digitaux que le papier me donne l’impression de renouer avec un peu d’humanité. Peut-être que mon cahier est un peu comme un doudou, il rassure…
J’aime aussi entrer dans une papeterie, toucher les cahiers, les stylos : il est rare que je ressorte sans un achat. J’ai ainsi eu l’occasion, lors d’un déplacement professionnel à Singapour, alors que j’étais accompagnée d’une collègue toute aussi fan de papier que moi, de tomber sur une petite boutique dingue, pleine de papeterie asiatique avec des choses qu’on ne trouve pas en France : nous y avons fait une vraie razzia, c’était le paradis !
Les cahiers, je les aime en petit format, intérieur ligné et sans spirales car je n’aime pas arracher les pages d’un cahier : j’ai l’impression de le dépouiller. Pour la couverture, je marche au coup de coeur. J’en ai toujours quelques-uns d’avance à la maison et quand je dois en entamer un nouveau j’aime bien pouvoir choisir en fonction de l’humeur du moment.
De qui aimerais-tu lire le cahier ?
Je ne sais pas si j’aimerais lire le cahier de quelqu’un d’autre. En tout cas, il faudrait que j’y sois autorisée car j’aurais l’impression de pénétrer son intimité. Dans ce cas, je choisirais de lire le cahier d’un écrivain et sans doute celui de Maupassant pour découvrir la genèse de ses nouvelles, s’il a écrit des choses en plus et pourquoi il a décidé de ne pas les conserver, une autre fin était-elle prévue, existe-t-il d’autres développements à l’histoire…
Et ta citation ou phrase favorite ?
Ne rien lâcher, jamais.
Je suis quelqu’un d’opiniâtre, parfois un peu entêtée et j’aime bien aller au bout des choses.
Merci Florence pour cet échange très sincère et qui nous montre que la feel good paper théorie peut se vivre partout, même au bureau ! Si, comme Florence, vous avez envie de me parler de vos cahiers, faites-moi signe, j’adore vous écouter !